« On ne peut pas être juge et partie dans la mesure des campagnes »

Sophie Poncin, Présidente du Syndicat des Régies internet (SRI), réagit sur les récentes erreurs de métriques sur Facebook. Elle détaille également les grandes lignes du Label de qualité publicitaire mis en place avec l’Udecam qui s’articule autour de 5 grandes thématiques : brand safety, lutte contre la fraude, visibilité, expérience utilisateur et respect des données personnelles.
 
100%MEDIA : Facebook a récemment admis avoir surestimé différents indicateurs de mesure de performance de ses campagnes. Quelles sont les conséquences pour le marché publicitaire ?
 
SP : Cela continue à jeter le discrédit sur notre marché digital et à entretenir l’idée de son opacité. Par ailleurs, cela montre bien qu’on ne peut pas être juge et partie !  Il est nécessaire de demander une  meilleure mesurabilité de ces plateformes puisque c’est déjà une exigence à laquelle se conforme l’ensemble des autres acteurs. Pour nos régies, la pression est très forte en termes d’adverification & d’indicateurs. Non seulement cela entraine des coûts supplémentaires mais en plus, souvent cela ne nous permet pas d’augmenter la valeur de nos inventaires. On ne peut donc que se féliciter de l’ouverture progressive de Facebook aux mesureurs tiers.
 
 
100%MEDIA : En quoi ce mea culpa est-t-il révélateur d’un problème plus global ?
 
SP : Le problème, c’est qu’il y a deux poids, deux mesures : aucun organisme de mesure indépendant ou aucun autre site ne pourrait se permettre des telles erreurs sans un vrai risque de désengagement des annonceurs. Or, vu la croissance phénoménale des investissements sur ces plateformes, on observe qu’ils ne courent pas tellement de risques. Prenons l’exemple du problème Fun/Médiametrie et l’ampleur médiatique que cela a pris en juin : a-t-on un tel écho aujourd’hui en France avec les « erreurs » de Google et Facebook ? Par rapport aux Etats-Unis où l’ANA a pris position dès septembre, on entend très peu les agences et les annonceurs français sur ce sujet. Le SRI appelle donc les annonceurs et leurs agences, collectivement, à demander plus de transparence dans les mesures et traiter avec équité, l’ensemble des acteurs du secteur. Le CESP devrait d’ailleurs se pencher sur le sujet bientôt.
 
100%MEDIA : Le SRI et l’Udecam ont initié la création d’un label de qualité publicitaire cet été. Quelles sont les avancées et comment s’articule ce projet ?
 
SP : Notre Label, qui est encore en cours de construction avec toutes les parties prenantes du marché, va balayer cinq grandes thématiques : la brand safety, le trafic humain (vs fraude), la visibilité, l’expérience utilisateur (encombrement pub & formats) et le respect des données personnelles. Non seulement ce Label s’inscrit dans le sillon des initiatives marché indispensables – nouvelles recommandations de formats IAB, Coalition for Better Ads, Observatoire des pratiques publicitaires digitales de l’ARPP – mais c’est aussi, localement, un outil pour atteindre un plus haut niveau d’exigence et une meilleure valorisation, en donnant aux annonceurs des repères concrets basés sur des critères qualitatifs mesurables sur les 5 thèmes pré-cités. Ce Label  nous engage vers une meilleure lisibilité des offres publicitaires et une vraie exigence de transparence, notamment au travers de mesures tierces.
 
 100%MEDIA : Comment ce label va-t-il se positionner vis-à-vis de Google et Facebook ?
 
SP : Ce label sera apposé par un tiers de confiance, il ne se limite donc pas à nos membres, tous les acteurs seront bienvenus. Parmi les critères du label, figure cette notion de transparence et de mesures indépendantes et agnostiques, indispensables à la restauration de la confiance. C’est pour nous un formidable moyen d’initier une nouvelle écologie publicitaire.